Safran libère l’espace
Publié le 18/09/2018
Reconnue à l’international pour la fiabilité et la précision des matériels optiques et optroniques sortis de ses ateliers, l’entreprise Safran Electronics & Défense de Saint-Benoît va bientôt entrer dans une nouvelle dimension, avec la fabrication du miroir central parabolique du plus grand télescope au monde.
« Le petit pas pour l’Homme » d’hier s’est mué en « bond de géant pour l’Humanité ». Qui sait si, quarante-neuf ans après l’aveu extatique de Neil Armstrong, une nouvelle étape essentielle de l’histoire de la conquête spatiale n’est pas en train de s’écrire. Si c’est le cas, cette histoire retiendra qu’une entreprise poitevine aura apporté son écot à l’appréhension de l’inconnu par le monde, à l’explication de l’insoupçonné, à la découverte, longtemps impossible, d’univers parallèles. Car tel est le destin de Safran Electronics & Défense, de ses plus de cinq cents salariés, intérimaires, apprentis et de son dirigeant, Guillaume Oulié, invités il y a quelques mois à façonner le miroir central du plus grand télescope jamais créé. Un équipement au diamètre impressionnant de 39 mètres, qui aura pour mission, à partir de 2024, de son lieu d’implantation au Chili, de caractériser -et non plus simplement détecter- des exoplanètes rocheuses d’une taille similaire à celle de la Terre et situées dans la zone d’habitabilité de leur étoile. « Le télescope ELT sera capable, dans un rayon de 25 années-lumière, de fournir des images quinze fois plus précises que le télescope spatial Hubble », se félicite Guillaume Oulié.
930 segments d’1,40m
Dans cette démarche d’asservissement des univers lointains, le rôle du miroir central « M1 » sera prépondérant. La responsabilité de Safran Electronics & Défense est totalement engagée, puisque l’entreprise sancto-bénédictine s’est vu confier, par sa filiale Safran Reosc, leader mondial de l’optique astronomique et spatiale, lauréate de l’appel d’offres international lancé par l’European Southern Observatory, le soin de façonner les quelque 931 segments d’1,40 m appelés à composer le miroir. « La difficulté de cette opération tient au fait que nous devons polir chaque segment en fonction de son positionnement dans le miroir en forme d’essaim d’abeilles, prévient Guillaume Oulié. Certains éléments du puzzle seront plus courbés que d’autres. Nous ne trouverons jamais deux segments voisins identiques. »
Réalisé par usinage ionique, ce polissage minutieux au nanomètre près (dix millionièmes de millimètre, svp !) fera, dans un premier temps, l’objet de travaux expérimentaux. Guillaume Oulié : « Nous disposons d’un entrepôt de 5 000 m2 jusqu’alors inutilisé, que nous transformons petit à petit, avec l’aide subventionnelle de la Région Nouvelle-Aquitaine, en Usine du futur. Dans l’attente de l’arrivée de l’ensemble des équipements dont nous avons besoin, nous allons tester les process, préparer le terrain pour que tout soit fin prêt en 2019. Nous prévoyons de sortir notre premier segment au printemps 2019, puis nous en fabriquerons quelques autres au cours de l’année 2020, avec une cadence imposée d’une unité par jour jusqu’à 2024. »
Passé maître dans l’art de l’optique et de l’optronique, le site de Saint-Benoît est notamment spécialisé dans la conception de matériels, portables et embarqués, pour l’armée, tels que des caméras et jumelles infrarouges, modules de détection ou de guidage. La voilà désormais face à l’immensité de l’espace. Un petit pas pour l’Humanité, un saut de géant pour l’industrie poitevine.
Les chiffres qui comptent
Filiale du Groupe Safran (91 000 salariés dans une trentaine de pays, 16,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires dans les domaines de la propulsion aéronautique et spatiale, des équipements aéronautiques et de la Défense), Safran Electronics & Défense emploie à elle seule 7 850 personnes, dont 84% en France. Sur son site poitevin, ouvert en 1974, travaillent 450 collaborateurs.